Comment réduire la fatigue informationnelle pour mieux s’informer

Stress, anxiété, les effets néfastes de la fatigue informationnelle sont nombreux. L’économie de l’attention est grandement responsable de cette surinformation. Il est temps de retrouver une consommation plus raisonnée de l’information.

Qu’est-ce que la fatigue informationnelle

Une étude de la Fondation Jean-Jaurès montre que plus d’un Français sur deux subit une « fatigue informationnelle » face à l’actualité, sans forcément en avoir pleinement conscience.

Pourtant, la consommation d’information reste de plus en plus importante, comme si on était accroc à l’actualité.

Les chaînes d’info en continu se portent bien. Les modes de consommation de l’information évoluent également, du fait des nouvelles technologies. En particulier chez les plus jeunes, pour lesquels internet reste le principal média d’accès à l’information.

Submergé dans ce flot incessant et répétitif d’actualités, notre esprit ne se repose plus et tente de comprendre et d’analyser des évènements et informations sur lesquels nous n’avons pas une maîtrise réelle. Cela peut engendrer du stress, de l’anxiété, de la fatigue, pour des évènements qui ne nous appartiennent pas forcément.

Pourquoi la fatigue informationnelle est nouvelle : l’économie de l’attention au centre du problème

Pendant des décennies, la TV et la radio étaient les maîtres du modèle économique de l’attention. Le principe est simple : offrir des contenus gratuits pour accaparer votre attention et ainsi vendre du « temps de cerveau disponible » à des annonceurs (selon les propres termes d’un patron de chaîne TV) .

Les réseaux sociaux sont ensuite apparus.

Ces derniers ont repris le modèle économique de la TV et de la radio, mais en le poussant à son paroxysme. Les réseaux sociaux ont volontairement décuplé les stratégies et mécanismes d’addiction, quitte à exploiter sans scrupule des biais cognitifs. C’est ainsi qu’on est venu à parler de « brain hacking », littéralement le piratage de cerveau. Et la tendance n’est pas près de s’inverser, en témoigne la façon dont TikTok a encore poussé les mécanismes d’addiction plus loin que ses ainés comme Facebook et X (ex Twitter).

Le brain hacking désigne l'exploitation de biais cognitifs, par exemple pour les réseaux sociaux, pour augmenter l'addiction.
Les réseaux sociaux ont exploité des biais cognitifs pour développer l’addiction (Image générée par IA)

Ce développement, accompagné en même temps par l’avènement du smartphone, a complètement changé le paradigme. Il est fini le temps où c’est nous qui allons chercher l’information. Désormais, c’est l’information qui vient à nous et en permanence.

Face à cette attaque sur leurs propres terres, les médias traditionnels ont dû s’adapter pour défendre leur audience, et avec elle leurs revenus (la publicité). Pour certains, la stratégie de défense a notamment consisté à faire la course avec les réseaux sociaux.

C’est ici que les choses ont commencé à basculer : bandeau « alerte info » 24h/24 sur des chaines d’info en continu, clickbait (pièges à clics) sur des titres d’articles en ligne, contenu éditorial basé parfois sur les topics tendance des réseaux sociaux sans forcément rester vigilant à la représentativité dans le débat public.

Mais cette course sans fin ne peut être équitable pour les médias. D’abord, parce que les médias vérifient et analysent l’information avant de la diffuser (c’est bien leur métier et heureusement). Ensuite, parce que leurs canaux de diffusion ne s’appuient pas sur des mécanismes et algorithmes aussi poussés que les réseaux sociaux.

Comment sortir de la fatigue informationnelle et mieux s’informer ?

Est-ce à dire que nous devons accepter la situation sans avoir notre mot à dire ? Ou alors se déconnecter de toute actualité. Evidemment non.

Le rôle des médias et des journalistes est plus que jamais vital. Avec l’avènement de l’IA, nos sociétés risquent en effet de plonger dans une nouvelle ère de la désinformation. La vérification des informations et la fiabilité des sources doivent redevenir une priorité dans notre consommation de l’information.

Selon un sondage Odoxa de 2019, un tiers des français reconnaît avoir déjà relayé de fausses informations. Le chiffre monte à 50% parmi ceux qui s’informent essentiellement à partir des réseaux sociaux.

A nous de changer nos modes de consommation de l’information donc, pour à la fois soutenir les journalistes dans leur travail de qualité, et préserver ce qui est le plus important pour nous (notre temps).

Mais comment faire ?

Ci-dessous quelques une des actions que j’ai prises pour mieux m’informer/

Désactiver les notifications sur son smartphone

Au début de l’ère du smartphone, les marketeurs déconseillaient de pousser plus d’1 notification par semaine, de peur de lasser l’utilisateur. Ce temps semble bien loin. Désormais nous recevons des dizaines de notifications par jour. Le but de ces notifications est majoritairement le même : accaparer notre attention.

Pour respirer face à l’information, désactiver les notifications de ces applications est un bon début. Le principe est simple : c’est vous qui allez à l’information aux moments que vous décidez, et non l’information qui vient à vous à n’importe quel moment de la journée.

Pas de réseaux sociaux le matin

Le matin est le moment où le cerveau est le plus reposé et disponible pour réaliser les tâches les plus importantes.

Ne pas consulter de réseau social avant 13h reste un bon geste d’hygiène numérique que j’essaie d’appliquer pour limiter cette pollution d’information.

L’information peut-elle être encore gratuite?

Nous avons été habitués à la gratuité avec le web. Google est gratuit, Gmail est gratuit, Facebook est gratuit. Et maintenant : ChatGPT est gratuit, Bard (l’IA de Google) est également gratuit.

Ce que les géants de la tech ont bien omis de nous dire pendant des années, c’est que cette gratuité avait un prix : nos données personnelles. Ces données dont ils ont besoin à la fois pour vivre grâce à l’économie de l’attention, mais aussi pour alimenter leurs intelligences artificielles de sorte à maintenir leur hégémonie pour toujours plus accaparer notre attention (donc leurs revenus).

Pourtant, le vent commence à tourner lentement. Facebook est notamment en train de proposer prochainement un abonnement mensuel qui permettra de supprimer la publicité.

En matière d’information, j’ai tendance à penser aussi que le vent commence à tourner. L’information gratuite ne peut pas être l’unique source d’information. Car la gratuité soulève à nouveau la question de son financement : la publicité, c’est à dire l’économie de l’attention, c’est à dire la course avec les réseaux sociaux.

Pour sortir de cette spirale, alors l’information doit trouver ses revenus ailleurs. La presse écrite a été mise grandement en difficulté sur cette dernière décennie. Pourtant, son modèle semble plus vertueux : d’abord parce que le principe d’abonnement permet de rémunérer les journalistes pour leur travail, ce qui limite donc la recherche de financement par d’autres biais. Ensuite, parce qu’elle permet un temps de recul entre l’information et sa diffusion.

La revue de presse pour diversifier ses sources et hiérarchiser l’information

Diversifier ses sources d’information est un bon moyen de ne pas rester dans une bulle de contenu (ce phénomène qui a été exacerbé par les algorithmes des réseaux sociaux, en nous emprisonnant dans des contenus ciblés en fonction de notre profil).

La revue de presse permet de diversifier ses sources, mais aussi d’accéder à une information hiérarchisée : les contenus qui sont mis en avant ne sont pas liés à des algorithmes d’intelligence artificielle recherchant à maximiser l’audience, mais proviennent d’un choix éditorial des journalistes.

Je recommande notamment le Courrier International, qui reprend des articles de presse du monde entier. Toujours avec une attention particulière sur l’importance des sources, le Courrier International fournit systématiquement un descriptif du journal mentionné, notamment avec son courant politique.

Ainsi que l’excellent Brief.me que j’ai découvert il y a peu : une newsletter payante qui donne tous les jours un condensé de l’actualité nationale et internationale.

Enfin, j’ai trouvé l’application Informed aussi, mais notez qu’elle n’est disponible qu’en anglais. Elle fournit des articles de la presse internationale. Ce que j’apprécie notamment, c’est que chaque jour, l’application propose une sélection d’articles, mais elle vous laisse également à côté choisir des thèmes préférés. Chaque article proposé présente un résumé, et il est possible de consulter l’article dans le détail.

Fatigue informationnelle : pour aller plus loin

Si vous êtes intéressé par le sujet, je vous recommande 2 livres pour continuer la lecture.

Le 1er est S’informer, à quoi bon (lien rémunéré par Amazon). J’ai particulièrement apprécié ce court texte rédigé par Bruno Patino, président de la chaîne Arte et professeur à Sciences Po. Il se lit très facilement, et permet de re-situer le contexte et les enjeux autour de l’information, tant individuellement que pour notre société.

Le 2nd est le livre Apocalypse cognitive (lien rémunéré par Amazon). Il est plus difficile d’accès, mais a remporté plusieurs prix et apporte de nombreux éclairages et analyses sur la dérive de notre société moderne sur ce sujet de l’information.

Kevin
Kevin
Fondateur et rédacteur de ce blog. Je suis un enthousiaste des nouvelles technologies et partage ici des conseils sur la high-tech au travers de guides d'achat, tests de produits et tutoriels.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici